Sébastien Joly revit. Rassurée. Après le choc. L'annonce d'un cancer, fin juin. En pleine ascension d'une carrière véritablement lancée. La trajectoire brisée. Cette angoisse folle qui vous étreint. Mais Seb est là, devant nous. Rien ne trahit le signe d'une quelconque maladie. Sinon les traces _quelques points de tatouage_ sur l'abdomen, stigmates des séances de radiothérapie qu'il dévoile en relevant son tee-shirt blanc de la Française des Jeux.
Le coursier de Saint-Vallier nous apparaît en pleine forme, dans l'appartement qu'il a joliment aménagé. Le soleil du midi réchauffe la façade contre laquelle trône son Lapierre de la FDJ. Com. Au pédalier, un capteur de puissance dernier cri. Prêt à fournir le montant des watts au champion. Sous les doigts de Seb Joly, un calendrier où il a déjà coché toutes les dates de son emploi du temps hivernal : "J'envisage ma rentrée début février (Étoile de Bessèges ou Tour méditerranéen). Mais sans obsession. Je ferai vraiment le point lors des stages de décembre sur la Côte d'Azur."
"Je ne me prends pas pour un survivor"
En attendant, Seb a repris les bonnes vieilles habitudes d'inter-saison. Comme avant l'apparition du crabe. Footings au bord de la Galaure, VTT, route, bientôt natation et cyclo-cross... Confiant sur le renouvellement de son contrat avec son employeur de la FDJ. Com, le Drômois sourit à la vie. Et chasse les clichés d'un revers de main : "Beaucoup de gens ont fait la relation avec ce qui était survenu à Lance Armstrong. Mais je ne me prends par pour un survivor. Je considère que mon cancer a été pris au stade 1 de la maladie. Il a été soigné avec rapidité.
"Devant l'apparition de "ce cancer du jeune", Seb s'est beaucoup documenté. Il est entré aussi en relation avec le triathlète international valentinois Pierre Dorez, atteint des mêmes maux voici deux ans, et qui a repris la compétition : "Avec Pierre, on s'est beaucoup parlés. On a beaucoup relativisé notre mal. Ce n'est rien à côté de ce que d'autres gens peuvent endurer. Notre cancer est survenu sur une partie du corps quand même extérieure."
Comme une renaissance
Durant son traitement, Seb a suivi "d'abord avec intérêt " la Grande Boucle. Puis il a "zappé" les dernières étapes. Préférant rendre visite et bricoler chez son vélociste, l'ancien coursier Sébastien Fay, à Tain l'Hermitage : "Il y a vraiment un cyclisme à deux vitesses. La Ligue 1 et la Ligue 2. Et les Français évoluent en Ligue 2. Sur le Tour, on ne nous laisse que des miettes. Mais les patrons du cyclisme donnent l'impression de vouloir vraiment avancer sur le dopage." Sébastien s'épanchera de longues minutes sur le sujet. Tout en ajoutant : "Ceci dit, les Français ont sans doute aussi des progrès à faire au plan de l'entraînement, de la préparation en équipe... Nous nous devons d'abord d'être irréprochables sur ce plan-là, avant de crier au loup."
Pro depuis l'âge de 20 ans, Sébastien sait qu'il dispose d'un vécu important. Qui peut lui ouvrir aujourd'hui de nouvelles perspectives de carrière. Comme ses deux dernières saisons l'ont laissé entrevoir. Alors, il faut aussi oublier progressivement le traumatisme _doux euphémisme_ de cet été 2007. Se concentrer sur les efforts à l'entraînement. Guetter les signes de récupération. Traverser à nouveau cette belle campagne drômoise derrière le derny de Paul Luciez, faire monter les watts et les pulsations. Dans le magasin de Sébastien Fay, l'ancien vélo à pignon fixe vient également d'être remonté. Comme une nouvelle renaissance.
(source: Le dauphiné libéré.com ; image: site officiel de Sébastien Joly=